être précédé de l’épithète de Mahâ, « le grand Religieux. » Ainsi que le terme de Bhikchu, celui de Çramaṇa appartient à la langue brâhmanique ; mais les Buddhistes en font une application toute spéciale aux ascètes de leur croyance, et les drames indiens nous prouvent par plus d’un exemple que les Brâhmanes eux-mêmes reconnaissaient la légitimité de cette application[1].
Il arrivait quelquefois que les conversions n’étaient pas toutes aussi rapides que celle de Pûrṇa ; alors celui qui désirait embrasser la vie ascétique, et qui ne satisfaisait pas aux diverses conditions requises, n’était pas pour cela repoussé de la réunion des Religieux où il voulait entrer. Sans faire encore partie de l’Assemblée des Bhikchus, il était placé sous la direction d’un Religieux et prenait le titre de Çrâmaṇêra, c’est-à-dire petit Çramaṇa ou ascète novice. Dès qu’il avait reçu l’investiture, il substituait à ce titre celui de Çramaṇa ou de Bhikchu. Ces deux degrés de Religieux paraissent dans les textes du Nord ; celui de Çrâmaṇêra y est cependant moins souvent usité que celui de Çramaṇa. Je ne crains pas de dire que cela vient de ce qu’au temps où nous reportent ces textes, le noviciat était un état beaucoup plus rare que celui de Religieux. La facilité avec laquelle les conversions s’opéraient donnait à ceux qui désiraient suivre Çâkya le moyen de franchir rapidement les premiers degrés de l’initiation.
J’ai parlé tout à l’heure de conditions imposées par Çâkyamuni à ceux qui voulaient devenir ses disciples ; ce point a besoin de quelques éclaircissements. La première de toutes les conditions était la foi, et on peut croire que ceux qui y satisfaisaient devaient être dispensés de toutes les autres. Mais il est également aisé de comprendre que Çâkya ou ses premiers successeurs aient bientôt reconnu la nécessité d’y joindre quelques autres obligations d’une exécution un peu moins facile. Cette nécessité dut même se faire d’autant plus promptement sentir, que la croyance nouvelle trouvait plus de faveur auprès du peuple. Les légendes qui ont pris place dans la section de la Discipline nous donnent à ce sujet les renseignements les plus instructifs. On y voit que Çâkya reçoit tous ceux qui se présentent à lui, mais que sitôt qu’une admission donne lieu à quelque difficulté, il se hâte de l’annuler par une décision qui devait devenir une règle pour ses successeurs. C’est
- ↑ Je pourrais citer ici les paroles de ce joueur du Mrĭtch tchhakaṭî, qui, poursuivi pour dettes, n’a d’autre ressource que de se faire disciple de Çakya ; car le terme pracrit dont il se sert, Çakka çavaṇake, est certainement la transcription du sanscrit Çâkya çramaṇaka, diminutif de Çâkya çramaṇa, qui se trouve dans le commentaire de l’édition de Calcutta. (Mrĭtch tchhakaṭi, p. 82, édit. Calc. Wilson, Hindu Theatre, t. I, p. 56, 2e édit.) Ce qui ne laisse à ce sujet aucun doute, c’est que le même Religieux est désigné ailleurs par son véritable titre de Çamaṇaka pour Çramaṇaka. (Mrĭtch tchhakaṭî, p. 213 et 329.)