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INTRODUCTION À L’HISTOIRE


serviteur de Bhagavat ; c’est lui qui était le premier de ceux qui avaient beaucoup entendu, et qui avaient compris la parole [du Maître]. Et il ajouta cette stance :

Soigneux de garder le vase du solitaire, plein de mémoire, de fermeté et d’intelligence, Ânanda, cet océan de savoir, ce vase de vertus, ce sage, dont les douces paroles étaient claires et qui, toujours intelligent, était habile à pénétrer la pensée du Buddha parfait, Ânanda enfin, vainqueur dans toutes les luttes, et loué par le Djina, est constamment honoré par les hommes et par les Dieux.

Le roi donna pour son Stûpa dix millions [de Suvarṇas]. Pourquoi donc, dirent les ministres, le roi honore-t-il ce Stûpa plus que tous les autres ? Voici, répondit le roi, quelle est ma pensée.

Ce sage, dont le nom exprime l’absence de tristesse, mérite d’être particulièrement honoré, parce qu’il a soutenu le corps pur du plus éloquent des maîtres, le corps de celui qui fut la Loi même.

Si le flambeau de la Loi qui dissipe les ténèbres épaisses des douleurs brille aujourd’hui parmi les hommes, c’est grâce à la puissance de ce fils du Sugata ; voilà pourquoi il mérite d’être particulièrement honoré.

De même que pour avoir de l’eau de l’Océan, personne ne va chercher dans le pas d’une vache ; ainsi c’est après avoir reconnu son naturel et sa condition que le souverain Maître a consacré ce Sthavira comme le dépositaire des Sûtras.

Le roi, après avoir rendu ces honneurs aux Stupas des Sthaviras, se jeta aux pieds du Sthavira Upagupta, et lui dit le cœur rempli de joie : J’ai donné un but à la condition d’homme qu’on obtient par le sacrifice aux cent offrandes[1] ; j’ai extrait l’essence des avantages passagers et vains de la puissance royale ; je me suis assuré l’autre monde, et j’ai orné celui-ci de centaines de Tchâityas, plus brillants que le nuage aux teintes blanches ; n’ai-je donc pas aujourd’hui accompli la Loi, si difficile à exécuter, de l’être incomparable ? Enfin le roi s’étant incliné devant Upagupta, se retira.

Quand le roi Açoka eut ainsi donné cent mille [Suvarṇas] à chacun de ces endroits, le lieu de la naissance, l’arbre Bôdhi, l’endroit où le Buddha avait fait tourner la roue de la Loi, celui où il était entré dans le Nirvâṇa, il porta principalement sa faveur sur l’arbre Bôdhi, en songeant que c’était là que Bhagavat avait obtenu l’état de Buddha parfaitement accompli. Il envoya donc à cet arbre tout ce qu’il avait de plus précieux en fait de joyaux. La première des

  1. Il serait peut-être plus conforme aux idées buddhiques de dire, « qu’on n’obtient pas… » Nos manuscrits sont en cet endroit fort incorrects.