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DU BUDDHISME INDIEN.

plusieurs Sûtras, qu’il y avait dans cette partie de la littérature sacrée des époques diverses, faciles sinon à dater, du moins à distinguer. L’existence du titre de Sûtra donné à un Tantra prouve seulement que les Sûtras passent aux yeux des Buddhistes du Népâl pour la parole même de Çâkya, et nous ramène à ce résultat, plusieurs fois indiqué dans le cours de ces recherches, que c’est aux Sûtras qu’il faut toujours revenir, si l’on veut retrouver soit la forme la plus ancienne de son enseignement, soit la forme la plus populaire sous laquelle il subsiste de nos jours au nord de l’Inde.

J’ai parcouru encore divers autres Tantras ; mais j’éprouve, je l’avoue, quelques scrupules à faire partager au lecteur l’ennui que m’a causé cette étude. Je citerai, entre autres, le Sam̃varôdaya tantra, ou Le lever du mystère ou de Sam̃vara, si ce dernier mot est réellement un nom propre. Suivant Csoma, Sam̃vara est le nom d’une des divinités qui appartiennent spécialement aux sectateurs des Tantras et des pratiques qu’ils exposent. Le traité dont je parle est écrit moins en l’honneur de Sam̃vara qu’à la gloire de Hêruka, autre Dieu de la même espèce, peut-être le même sous un autre nom. Je ne m’arrêterai pas à rapporter les prières, les formules magiques et les cérémonies recommandées par ce livre ; il en est quelques-unes où les substances que l’on emploie sont des cheveux ramassés dans les cimetières et des poils de chameau, d’âne et de chien. La superstition la plus grossière domine dans cet ouvrage, où rien ne rappellerait le Buddhisme, si l’on n’y voyait paraître à de rares intervalles le nom du Buddha. La récompense promise à ces pratiques ridicules est bien moins l’état de Buddha qu’une sorte de perfection (Siddhi), qui consiste dans la possession d’une puissance surnaturelle qui sert ordinairement des intérêts purement humains. Ce livre renferme un chapitre sur les signes qui annoncent la mort ; un autre sur les quatre Yugas ou âges du monde ; un autre sur les quatre îles ou continents ; un sur la préparation du feu pour le sacrifice et sur le Hôma ou offrande au feu, sujets dont quelques-uns nous éloignent du Buddhisme pour nous rapprocher du Brâhmanisme.

Dans un chapitre spécialement consacré aux Mantras, le culte des Divinités çivaïtes est positivement recommandé, et le premier Mantra est ainsi conçu : « Ôm ! Adoration au serviteur de Mahâkâla qui habite dans les cimetières. » Le Linga figure parmi les objets de cette adoration superstitieuse. On y donne le moyen de se débarrasser d’un ennemi en traçant son image d’une certaine manière et avec des formules déterminées. À la fin de l’ouvrage se trouve un chapitre plein de pratiques obscènes, qui sont écrites en un sanscrit si incorrect et probablement si spécial, que je ne me flatte pas de les avoir toutes comprises ; j’en ai assez vu cependant pour reconnaître que les Tantras bud-