Page:Burnouf - La Science des religions.djvu/210

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Quand, par une nouvelle application de la méthode, on réduisit le nombre des esprits, non à des catégories, mais à des unités vivantes, on conçut les dieux et le polythéisme naissant prit la place de l’animisme. Celui-ci ne fut pas subitement banni des croyances populaires ; mais il le fut de la religion commune. Le progrès fut réel ; car le polythéisme anima de grandes civilisations en Europe et en Asie. Il inspire encore aujourd’hui les arts chez les peuples chrétiens. Enfin l’analyse de l’idée de Dieu continuant de s’approfondir, on s’aperçut que les dieux Immortels, les personnes divines, avaient entre elles les plus grandes analogies, que leur nombre pouvait être réduit et même ramené à l’unité. Les dieux perdirent leur existence propre et disparurent dans l’unité du Dieu des peuples modernes.

Le même fait se produisait de la même manière mais sur d’autres éléments dans le monde sémitique. Les hommes de cette race s’étaient fait une multitude de dieux locaux figurant les phénomènes naturels dont on était le plus vivement frappé. Ces dieux ne faisaient qu’énoncer les lois des phénomènes ; ils avaient comme elles quelque chose d’abstrait. Quand les familles sémites formèrent des peuplades et les peuplades des nations, beaucoup d’hommes gardèrent chez eux leurs anciennes idoles, leurs téraphim ; mais la religion commune fut comme un moyen terme et le dieu alla se généralisant. On vit disparaître les divinités particulières, Sin, Samas, Nabou, Asour, Kamosh, Tammouz, Astarté. On ne conserva que l’idée moyenne exprimée par le nom qui les qualifiait toutes, El, Allah.

De part et d’autre, l’idée de Dieu allait se dépouillant de ses particularités. Les êtres divins diminuaient en nombre. Leur action dans la nature était de moins en moins locale, de plus en plus universelle. Leurs attributs particuliers n’avaient plus de raison d’être. Leurs