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comme le pape de cette grande église, et concevait l’espérance de l’être un jour de tous les chrétiens d’Orient.

Les époques chez un même peuple ne sont pas non plus indifférentes à l’œuvre et au succès des orthodoxies. L’Inde et l’Occident fournissent là-dessus des faits décisifs. Quand les Aryas débouchèrent dans les vallées de l’Indus, ils n’avaient pas encore les éléments de brâhmanisme qui sont dans le Vêda, car ces hymnes furent en majeure partie composés sur ce fleuve et ses affluents. Les conquérants s’étendirent sur le Caboul et jusqu’à la Saraswatî, qui, entre l’Indus et le Gange, va du nord au sud et perd ses eaux dans le désert. Leur établissement orthodoxe commença après la conquête, naquit avec leur puissance territoriale, grandit et se consolida avec elle. Il ne semble pas que pendant un millier d’années il y ait eu dans la société brahmanique aucune lutte sérieuse causée par l’orthodoxie âryenne. Celle-ci, au contraire, par la netteté de ses formules et de ses prescriptions, fut une garantie de paix intérieure et de progrès vers le midi. Ce fut seulement à l’époque du Bouddha que le principe de la liberté individuelle et de l’égalité religieuse fut proclamé et introduisit, dans une société pacifiée à la manière romaine, un trouble auquel le bouddhisme succomba.

Quand une orthodoxie naît avec une civilisation placée, comme le fut le brâhmanisme, dans des conditions très-simples, elle en devient naturellement et sans effort la forme principale, d’après laquelle toutes les autres fonctions sociales se combinent et s’harmonisent. Parvenus à son âge adulte, elle est l’expression même de la civilisation d’un peuple ; et quand celle-ci vient à déchoir, elle la suit dans sa décadence. La chute du brâhmanismea commencé depuis longtemps, précipitée tour à tour par le bouddhisme et par les invasions mongoles et arabes ; mais sa dernière période n’a com-