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LIVRE QUATRIÈME.

agité par le sourire et par un amour pudique ; daigne donc, ô belle femme, exaucer ma prière.

31. Lève donc vers moi, et consens à me montrer ce visage, que me cache ta pudeur, ce visage qu’ornent de beaux sourcils et les astres de deux beaux yeux, qu’entourent de nombreuse boucles de longs cheveux noirs, et d’où doivent sortir de gracieuses paroles.

32. Aussitôt cette femme, troublée par la passion, accueillant avec un sourire Puram̃djana qui la sollicitait comme eût fait un homme peu maître de ses sens, lui répondit en ces termes :

33. Je ne connais, ô grand roi, ni mon créateur, ni le tien ; et je ne sais pas davantage l’auteur de mon nom et de ma race.

34. Je ne sais pas non plus comment il se fait que je me trouve aujourd’hui en ce lieu, et j’ignore également quel est celui qui a élevé cette ville destinée à me servir de séjour.

35. Ces hommes et ces femmes sont mes amis et mes amies, ô prince illustre ; et ce serpent, qui veille pendant que je dors, est le gardien de la ville.

36. Ah ! que tu es heureux d’être venu ici, toi qui recherches les plaisirs que donnent les sens ! Moi et mes amies, ô brave héros, nous comblerons tes désirs.

37. Règne, ô prince, sur cette ville aux neuf portes, et puisses-tu y jouir pendant cent années du bonheur des sens que je saurai te donner !

38. À quel autre que toi offrirai-je mes plaisirs ? Irai-je me livrer à l’ignorant qui, semblable au stupide animal, ne sait ce que c’est que la jouissance, ne pense jamais à l’avenir, et ignore qu’il y a un lendemain ?

39. Ici tu trouveras la richesse, le plaisir, le bonheur d’être père, le mérite du devoir, l’immortalité, la gloire et l’espérance d’obtenir le séjour de ces mondes heureux et purs que ne connaissent pas les ascètes contemplatifs.

40. On dit que la condition de maître de maison est, en ce monde, l’asile fortuné des Pitrĭs, des Dêvas, des Rĭchis, des hommes, des Bhûtas et de celui-là même qui l’embrasse.