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APPENDICE. — No II.

leur conduite ? — Nous avoues-tu, grand roi, [demanda Bhagavat,] que tu as adressé cette question à d’autres Samaṇas ou à d’autres Brahmanes ? — J’avoue, seigneur, que j’ai adressé cette question à d’autres Samaṇas et à d’autres Brahmanes. — Parle donc, grand roi, conformément à la réponse qu’ils t’ont donnée, si cela n’est pas pénible pour toi. — Il n’y a là, seigneur, rien de pénible pour moi ; Bhagavat est assis, Bhagavat, ou celui qui se montre sous sa figure. — Eh bien donc, grand roi, parle.

« Il arriva un jour, seigneur, que je me rendis à l’endroit où se trouvait Pûraṇa Kassapa et que quand j’y fus arrivé, après avoir échangé avec lui les compliments de la bienveillance et de la civilité, je m’assis de côté, et une fois assis, je m’adressai ainsi à Pûraṇa Kassapa[1] : Comme on voit, seigneur Kassapa, les divers états où s’exercent des industries distinctes, comme par exemple l’art de monter les éléphants, [etc. comme ci-dessus, jusqu’à] comme on voit, dis-je, ces divers états et tant d’autres encore analogues à ceux-là donner dès ce monde-ci à ceux qui les exercent un résultat prévu, qui est de les nourrir, de les rendre heureux et de les satisfaire eux-mêmes, de rendre également heureux et de satisfaire leurs pères et mères, leurs enfants et leurs femmes, leurs amis et leurs conseillers, de leur donner les moyens de présenter aux Samaṇas et aux Brâhmanes une offrande dont l’objet est au-dessus [de ce monde], qui a pour objet le ciel, dont le résultat doit être le bonheur, dont le ciel est le but, ainsi, seigneur Kassapa, est-il donc possible qu’on leur annonce dès ce monde-ci un tel résultat comme prévu et comme le fruit général de leur conduite ? Cela dit, seigneur, Pûraṇa Kassapa me parla ainsi : Pour celui qui agit, grand roi, comme pour celui qui fait agir, qui brise ou qui fait briser, qui cuit ou qui fait cuire, qui fait pleurer, qui tourmente, qui répand ou qui fait répandre, qui tue ou qui fait tuer, qui commet un vol, qui coupe par la moitié ou qui enlève un morceau, qui s’impose dans la maison [d’un autre][2], qui barre le chemin à quelqu’un, qui a commerce avec la femme d’un autre, qui dit des mensonges, pour l’agent de ces diverses actions il n’y a pas de péché qui soit fait par lui. L’homme qui se servant du Tchakra dont le cercle est une lame tranchante, ne ferait qu’un tas, qu’un rebut de chair de tous les êtres vivants qui sont sur cette terre, n’exécuterait pas une chose dont le péché serait la conséquence, une chose de laquelle lui accroîtrait le péché. Quand même il parcourrait la rive droite de la Gangâ tuant ou faisant tuer, coupant ou faisant couper, cuisant ou faisant cuire, ce ne serait pas une chose dont le péché serait la conséquence, une chose de laquelle lui accroîtrait le péché. Maintenant, quand même il parcourrait la rive septentrionale de la Gangâ, donnant des aumônes ou en faisant donner, célébrant des sacrifices, ce ne serait pas là une chose dont la vertu serait la conséquence, une chose de laquelle lui accroîtrait la vertu. Dans l’aumône, dans l’empire qu’on exerce sur soi-même, dans la retenue, dans la véracité[3], il n’y a pas de vertu, il n’y a pas accroissement de

  1. Ce Religieux est certainement celui qui est cité dans les livres du Népal sous le nom de Pûraṇa Kâçyapa. (Introd. à l’hist. du Buddh. t. I, p. 162.) Son titre de Kâçyapa, « le Kaçyapide, » prouve qu’il appartenait à la race de Kaçyapa. »
  2. Le texte a êkâgârikam karôtô, expression qui est encore obscure pour moi.
  3. Le texte se sert du substantif satchtchavadjdjêna, qui doit être un nom abstrait dérivé de satchtchavâdi, « véridique ».