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Page:Burnouf - Lotus de la bonne loi.djvu/592

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APPENDICE. — No VII

L’interprétation que je propose resterait cependant trop vague, si je ne la plaçais pas à son véritable, point de vue. Le Lalita vistara me semble vouloir dire que l’habileté dans l’emploi des moyens, upâya kâuçâlya, ou seulement « les moyens, » et plus généralement la méthode, upâya, conduit celui qui la connaît et la pratique à ne laisser échapper aucune des lois, aucune des conditions d’un Buddha. La méthode a un but qu’on pourrait dire unique, c’est la conversion des êtres à la loi ; mais les moyens qu’elle emploie sont nombreux. Le plus général est la parole ; cependant ce moyen n’exclut pas les autres procédés plus extérieurs, et quelquefois également persuasifs, qui sont une apparence convenable, une posture décente. Voilà ce que doit exprimer la définition du Lalita vistara ; si elle donne pour exemple des moyens que sait employer un Buddha, quelque chose d’aussi peu important en apparence que la recherche d’une posture décente, c’est pour dire qu’on ne doit rien négliger de ce qui peut contribuer à la conversion des êtres. Maintenant, comment concilier cette interprétation avec celle de I. J. Schmidt qui traduit, d’après les Mongols, « la connaissance du développement de la nature, » c’est ce que je ne saurais dire. Veut-on faire entendre que parmi les moyens employés par un Buddha pour accomplir sa mission libératrice, on doit compter la connaissance du développement de la nature. » Alors la version des Mongols pourra se soutenir ; mais il faudra convenir aussi qu’elle ne sort pas directement des termes de la définition du Lalita.

Les trois Pâramitâs qui suivent, et qui terminent la seconde liste des dix perfections, exigeront moins de développements. La huitième est praṇidhâna, « la prière, » ou « le désir, « le vœu ; » c’est la demande que l’homme qui aspire à devenir Buddha adresse à un Buddha, pour obtenir sa bénédiction, à l’effet de devenir un jour lui-même un Buddha sauveur des hommes. Le mot signifie également, d’une manière plus générale, le vœu que l’on fait soi-même de ne rien négliger pour arriver à cet état de perfection ; il a pour synonyme praṇidhi, qu’on rencontre souvent, sous la forme de paṇidhi, dans les textes pâlis**1. La neuvième perfection est bala, « la vigueur, » et la dixième djñâna, « la science. »

En résumé, la seconde liste des Pâramitâs ajoute à la première l’habileté dans l’emploi des moyens, le vœu, la force et la science. Je dis ajoute, car il n’est pas douteux pour moi que ces quatre derniers termes ne se soient développés postérieurement à l’invention des six premiers. Ainsi la force et la science rentrent déjà dans l’énergie, et la sagesse de la première liste ; quant aux deux autres vertus, la connaissance des moyens et le vœu, ce sont certainement des vertus secondaires comparées aux grandes et importantes vertus de la liste des six perfections transcendantes.

Mais quand je dis que la seconde liste des dix perfections me paraît postérieure à la première, je ne veux pas prétendre par là qu’elle soit moderne. Il est certain qu’elle était déjà vulgaire au ve siècle de notre ère, puisque Mahânâma en parle comme de quelque chose de connu dans « un commentaire sur le Mâhâvam̃sa. Après avoir rappelé que Buddha, pour arriver un jour à l’état de Buddha, avait entendu de la bouche de vingt-quatre de ses prédécesseurs l’annonce de ses futures destinées, il ajoute qu’il pratiqua également toutes les vertus, et entre autres : dasa pâramiyô, dasa upapâramiyô, dasa