Page:Busoni - Chefs-d’œuvre poétiques des dames françaises, 1841.djvu/164

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Mais plutôt, ma Daphné, pour t’apprendre que j’aime.
Si tu blâmes un mal où je vois tant d’appas,
Plains une malheureuse, et ne l’accuse pas.


III


Tristesse, ennui, chagrin, langueur, mélancolie,
Troublerez-vous toujours le repos de ma vie ?
À toute heure, en tous lieux, sentirai-je vos coups,
Et ne pourrai-je pas être un moment sans vous ?
Je viens dans ces déserts chercher la solitude,
Où, seule, loin du bruit et de la multitude,
Je puisse en liberté dire mes sentimens ;
Déserts, soyez témoins des peines que je sens.
L’esprit tout agité de nouvelles alarmes,
Je viens ici cacher mes soupirs et mes larmes ;
Comme aux seuls confidens de ma vive douleur,
Je viens vous découvrir les secrets de mon cœur.
Le chagrin me dévore, et mon âme abattue.
Sans force et sans secours, cède au coup qui la tue.
Je souffre sans savoir ce qui me fait souffrir ;
Je cherche, mais en vain, les moyens de guérir.
De mes yeux languissans un éloquent silence
En dépit de moi-même explique ma souffrance ;
Je n’ai point de repos, ni la nuit ni le jour :
Hélas ! d’où vient mon mal, n’est-ce point de l’amour ;
Je ne puis voir Tircis que je ne sois émue ;
Je rougis de paroître interdite à sa vue ;
En sa mine, en son air, en chacun de ses traits.
Je trouve des appas inconnus et secrets ;
Le feu de ses regards, par qui son cœur s’explique,
Étincelle de joie et me la communique ;