Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/123

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Ah ! Madame, dit le Roi, je n’en aurois pas besoin si toutes les femmes étoient faites comme vous. — Après tout, dit la Reine, monsieur de Guise [1] se décria tellement pour deux ou trois affaires de cette nature que quand il est mort il n’eût pas trouvé une lingère du palais qui l’eût voulu croire. — Mais, Madame, lui dit Roquelaure en riant, quand un confesseur commande de rompre ? — Ah ! la bonne conscience ! interrompit le Roi ; ah ! l’homme de bien ! » Il continua cette conversation encore une heure, toujours pillant [2] Roquelaure. Ensuite il alla penser pour se confesser le lendemain, qu’il communia avec une dévotion admirable, et partagea la journée en trois : à Dieu, aux peuples, et à La Vallière, à laquelle il donna la fête de toutes les façons. Mais celle qui m’auroit le plus agréé, c’est un meuble entier de cristal tout façonné : il est certain que tous les meubles que j’ai jamais vus en ma vie doivent céder à la beauté et à l’éclat de celui-ci ; le seul candélabre est de deux mille louis. Deux jours après La Vallière envoya au Roi, par un gentilhomme de son frère, un habit et la garniture avec ce billet :

Je vous avoue que je me sens un peu de vanité

  1. Henri de Lorraine, deuxième du nom, duc de Guise, pair et grand chambellan de France, né en 1614, mort en 1664. Ses prétentions, sa jactance, ses nombreuses amourettes, ont été maintes fois racontées et chansonnées. On a vu plus haut (p. 93) une allusion à son amour pour mademoiselle de Pons. C’est à lui que Somaize dédia son Dictionnaire des Précieuses. Voy. notre édition de ce livre, t. 2, p. 251.
  2. Piller, railler, agacer. Terme pris de la chasse ; on dit à un chien : Pille, pille, c’est-à-dire mords. De là houspilier.