Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/291

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    Je lui dis : « Parle, que veux-tu
    Avecque ton « Tout est perdu ? »
     — Ah ! je ne veux, dit-il, pas autre chose,
Et après ce qu’hier certain oiseau m’apprit,
    J’étoufferai si je ne cause ;
    Voici donc ce que l’on m’a dit :
« Comme vous le savez, l’espèce volatille,
Reconnaît de tout temps les Aigles pour ses Rois,
Eh bien, vous savez donc que dans cette famille
    De qui nous recevons les lois
    Est une Aiglonne généreuse,
    Grande, fière, majestueuse,
Et qui porte si haut la grandeur de son sang,
    Que parmi toute notre espèce
Elle ne connoît point d’assez haute noblesse
Qui puisse lui donner un mari de son rang.
    Mille oiseaux pour, elle brûlèrent ;
    Mais parmi tous ceux qui l’aimèrent
    Aucun n’osa se déclarer,
    Aucun n’osa même espérer.
    Mais ce que mille oiseaux n’osèrent,
    Qui sembloient mieux le mériter,
    Un oiseau de moindre puissance,
  Un Moineau (tant partout règne la chance),
    A même pensé l’emporter.
    Ce moineau donc, suivant la règle
Qui commande aux oiseaux d’accompagner le Roi,
    Étoit à la suite de l’Aigle,
  Et même avoit près de lui quelque emploi.
Ce fut là que, suivant la pente naturelle
  Qui le portoit aux plaisirs de l’amour,
  Il s’occupoit moins à faire sa cour
    Qu’à voltiger de belle en belle,
Et s’y prenoit si bien qu’il trouvoit chaque jour