Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/325

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que le chevalier de Fosseuse venoit de faire pour madame de Bagneux, en sauvant son frère, avoit achevé de lui faire connoître la grandeur de sa passion ; et ce chevalier recevoit d’elle des marques de tendresse qui ne lui laissoient aucun lieu de douter qu’il ne possédât toute son affection. D’ailleurs, croyant que leur commerce n’étoit su de personne, ayant le bonheur de se voir avec assez de facilité, rien ne manquoit à leur satisfaction.

La mort du père de M. de Bagneux les sépara. M. de Bagneux fut obligé de faire un voyage en diverses provinces, où il lui avoit laissé plusieurs terres considérables. Il mena avec lui sa femme, qu’il aimoit aussi fortement qu’aux premiers jours de leur mariage ; joint que la jalousie qu’il avoit du baron de Villefranche contribua aussi à lui faire prendre cette résolution.

Quoique madame de Bagneux eût bien désiré de ne point faire ce voyage, les grands biens que M. de Bagneux avoit de son côté, en comparaison de ceux qu’elle lui avoit apportés, l’obligeoient à une grande complaisance.

Si le chevalier de Fosseuse et elle furent privés du plaisir de se voir, ils tâchèrent à s’en consoler en s’écrivant souvent. Bonneville recevoit les lettres du chevalier de Fosseuse et lui envoyoit celles de sa maîtresse.

La passion du chevalier de Fosseuse, qui étoit très violente, lui fit désirer, quelque temps après que madame de Bagneux fut partie, de la voir. Il la pria, par une de ses lettres, de lui permettre de se trouver en quelque lieu où il auroit ce bonheur ; elle ne put lui refuser une