Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/37

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si avantageux au Roi qu’elle espéroit qu’un jour les Espagnols pourroient bien être sous sa domination, ce qu’ils craignoient fort. De sorte que la lettre fut à la demoiselle de Mancini, et elle produisit l’effet qu’en avoit attendu le Roi. Comme ils furent ensemble, on remarqua que Sa Majesté prit tant de plaisir à la voir que, malade qu’il étoit, il parut avec une santé parfaite, ce qui fut bientôt répandu dans le public. Chacun en fut dans une joie extrême, et la Reine, entre autres, à qui on fut tout dire, vint en faire au Roi son compliment, et ensuite se tourna du côté de mademoiselle de Mancini, à qui elle dit : « Vous faites plus, Mademoiselle, que tous les médecins de France. » Le Roi, qui comprit bien ce que vouloit dire sa mère, lui répondit sur-le-champ : « Mademoiselle a raison de travailler de même pour moi, parce qu’elle y a plus d’intérêt que qui que ce soit, la regardant comme une personne qui doit être ma compagne ; et vous devez, Madame, vous attendre à la voir mon épouse, chose qui sera bientôt. »

La Reine se retira piquée, et mademoiselle de Mancini, qui n’avoit osé rien dire et qui s’étoit contentée de faire des révérences sur tout ce qu’elle avoit dit, fut bien aise, étant chez elle, de s’entretenir de tout ce qu’elle avoit ouï avec le Cardinal, qu’elle fit venir ; et, comme ils furent ensemble, elle lui rapporta tout fidèlement. Le Cardinal eût bien voulu, par ostentation, faire plaisir à sa nièce [1] ; mais il trouvoit tant de difficultés

  1. Nous ne saurions trop répéter, et nous ne nous lasserons point de le faire, pour combattre un préjugé trop répandu, que Mazarin a fait preuve, dans toute cette affaire,