Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/403

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

passion peuvent faire dire d’emporté et d’extravagant. Il lui dit qu’il avoit eu tort de se confier en une femme de sa sorte, puisqu’il devoit savoir que celles qui lui ressembloient, ayant fait banqueroute à leur honneur, la pouvoient bien faire à leurs amans ; qu’il alloit employer tout le crédit qu’il avoit sur le grand Alcandre pour le faire revenir d’un amour qui le perdoit de réputation dans le monde, et dont il ne connoissoit pas l’indignité.

Il lui dit encore plusieurs choses de la même force ; après quoi il s’en fut chez mademoiselle de Montpensier, à qui il annonça la volonté du grand Alcandre. Cette princesse, qui s’attendoit à des douceurs après lesquelles il y avoit nombre d’années qu’elle soupiroit, n’eut pas plutôt appris cette nouvelle qu’elle tomba évanouie, de sorte que toute l’eau de la Seine n’auroit pas été capable de la faire revenir, si M. de Lauzun n’eût approché son visage contre le sien pour lui dire à l’oreille qu’il n’étoit pas temps de se désespérer ainsi, mais de prendre des mesures qui les pussent mettre à couvert l’un et l’autre de la haine de leurs ennemis ; que cela ne consistoit cependant que dans une extrême diligence, parce que la perte d’un seul moment entraînoit une étrange suite ; que, pour lui, il étoit d’avis que, sans s’arrêter aux ordres du grand Alcandre, ils se mariassent secrètement ; que, quand la chose seroit faite, il y consentiroit bien, puisqu’il y avoit déjà consenti, et qu’en tout cas cela n’empêcheroit pas toujours leur intelligence et leur commerce.

La princesse revint de sa pamoison à un discours si éloquent et si agréable ; et, s’étant enfermés