Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/434

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pût retirer, elle s’embarrassa encore davantage, disant tantôt qu’elle les avoit prêtées à une de ses amies, tantôt qu’elles étoient chez le joaillier, qui les raccommodoit. M. de Bertillac, qui étoit homme d’expérience, vit bien qu’il y avoit quelque mystère là-dessous ; mais, n’en pouvant rien tirer davantage, il fut obligé de divulguer l’affaire dans la famille de sa belle-fille, qui la tourna de tant de côtés, qu’elle avoua à la fin qu’elle les avoit données à Baron, ce qu’elle tâcha néanmoins de déguiser sous le nom de prêter. Les parens furent en même temps chez ce comédien, qui nia d’abord la chose, croyant qu’on ne lui en parloit que par soupçon ; mais, sachant un moment après que c’étoit madame de Bertillac même qui avoit été obligée de le dire, et que même on en avoit déjà parlé au grand Alcandre, si bien que cela l’alloit perdre, il prit le parti de les rendre, et évita par là de se faire beaucoup d’affaires.

M. de Bertillac, croyant que son fils, qui étoit à l’armée, ne pouvoit pas manquer d’être averti de ce qui se passoit, se mit en tête qu’il valoit mieux que ce fût lui qui lui en donnât les premiers avis qu’un autre. Mais madame de Bertillac, qui avoit beaucoup de pouvoir sur l’esprit de son mari, l’ayant prévenu par une lettre, M. de Bertillac fut fort surpris qu’au lieu de remercîmens qu’il attendoit de son fils, il n’en reçût que des plaintes, comme si sa femme eût encore eu raison. Madame de Bertillac poussa l’artifice encore plus loin : elle manda à son mari de lui permettre de se retirer dans un couvent, disant qu’elle ne pouvoit plus vivre avec M. de Bertillac, qui en usoit