Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/472

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désobligeantes. Elle lui avoit d’abord reproché tout ce qu’elle avoit fait pour lui : qu’elle avoit quitté maison, enfans, mari et jusqu’à son honneur pour le suivre ; qu’il n’y avoit sorte de complaisance qu’elle ne lui témoignât tous les jours pour l’engager ; mais qu’il étoit devenu si froid, qu’il n’étoit plus reconnoissable ; que si c’étoit que les années lui eussent apporté quelques défauts, il ne s’en devoit pas prendre à elle, mais au temps, qui a coutume de détruire toutes choses ; que cependant elle ne s’apercevoit pas encore, grâce à Dieu, qu’il y eût un si grand changement en sa personne ; mais que pour lui, elle lui pouvoit dire, sans avoir dessein néanmoins de le fâcher, que, quoiqu’il eût beaucoup de lieu de se louer de la nature, il n’étoit pas exempt néanmoins de certains défauts, qui étoient un grand remède à l’amour ; qu’il en avoit un grand entre autres, dont peut-être il ne s’apercevoit pas, mais dont elle s’étoit bien aperçue, sans s’en être plainte néanmoins, parce qu’elle croyoit qu’on n’y devoit pas prendre garde de si près avec une personne qu’on aimoit.

Le grand Alcandre, à qui personne n’avoit jamais osé rien dire d’approchant, fut extrêmement touché de se l’entendre dire par madame de Montespan, pour qui il n’avoit guère moins fait qu’elle avoit fait pour lui : car, si elle avoit quitté maison, enfans et mari pour le suivre, il avoit quitté pour elle le soin de sa réputation, qui étoit extrêmement flétrie pour avoir aimé une femme qu’il avoit de si grandes raisons de ne pas regarder comme il avoit fait. Néanmoins, bien que les injures qu’on reçoit des personnes que