Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/75

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Reine, que je vous aimerai toujours, quoi que vous me fassiez. — Et moi, lui dit le Roi, j’en userai si bien que vous n’y aurez aucune peine ; mais si vous voulez m’obliger, vous n’écouterez plus madame de Soissons ni madame de Navailles [1] », parce qu’il savoit qu’elles avoient causé de La Vallière, et comme elle continuoit, et que La Vallière n’avoit jamais eu d’inclination pour elle, avant même qu’elle fût en crédit, le Roi se défit d’elle et de son mari.

Deux mois après, le Roi se mit en tête que La Vallière fût reçue des deux Reines, et souhaita qu’elles la vissent de bon œil. Pour cet effet il en parla à madame de Montausier, qui alla par ordre du Roi dès ce moment à la chambre de la jeune Reine. « Madame, lui dit-elle, c’est un Roi qui

  1. Suzanne de Beaudan, mademoiselle de Neuillan, dont il est souvent parlé sous ce nom dans les écrits du temps, épousa en 1651 Philippe de Montault, duc de Navailles. À l’époque qui nous occupe, M. de Navailles étoit gouverneur du Havre et commandant des chevau-légers. Madame de Navailles étoit dame d’honneur de la reine Marie-Thérèse, avec 1,200 livres de gages. « Cette espèce de disgrâce, dit Mademoiselle (éd. cit., V, 278), n’a pas ruiné leurs affaires. Ils vendirent leurs charges et leur gouvernement bien cher ; ils ont fait peu de dépense, ont payé leurs dettes et acheté des terres. Le duc de Chaulnes acheta la charge de commandant des chevau-légers, et le duc de Saint-Aignan le gouvernement du Havre, et celle de dame d’honneur fut achetée par madame de Montausier, à quoi elle étoit plus propre que madame de Navailles », qui, est-il dit à la page précédente, « s’est si extraordinairement occupée de mesquins ménages que cela lui a fait tort et à son mari. » Le duc de Navailles revint bientôt en faveur ; en 1669 il étoit gouverneur de La Rochelle, du pays d’Aunis et du Brouage ; la même année il commanda l’armée de Candie, et, après plusieurs commandements importants et plusieurs succès militaires, il fut même fait maréchal de France.