Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/162

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être présente à la grande opération qu’on fit à ce monarque, et elle s’offrit de prendre soin d’essuyer et bander une petite fistule qui lui est restée[1]. Le Roi, pénétré de reconnoissance et d’amour de toutes les soumissions de sa Vénus, prit, dans la Semaine Sainte, la résolution de satisfaire au conseil pieux du Père La Chaise, et d’en faire sa Junon, espérant par là de mettre en quelque manière sa conscience en repos. Mais comme Jupiter ne laissa pas d’avoir des concubines, ce grand héros Dieu-Donné ne prétendoit pas aussi se priver du doux plaisir de l’amour ; c’est pourquoi, lorsqu’il en fit la déclaration à la dame, il lui dit en même temps qu’il souhaitoit deux choses d’elle : la première, qu’elle renonçât pour toujours aux honneurs du diadême, et qu’elle seroit épousée de la main gauche ; mais ensuite le Roi lui dit, soit en se divertissant ou autrement, qu’il prétendoit qu’elle ne deviendroit jamais jalouse, comme ordinairement les femmes peu commodes le sont. Il ne faut pas douter qu’elle ne donnât fort agréablement les mains, et de bon cœur, à tout ce que Sa Majesté demanda d’elle : c’est pour ce sujet que, dans la crainte qu’étant devenue

  1. Louis XIV eut en effet à souffrir l’opération de la fistule. Madame de Maintenon y assista. Seule avec M. de Louvois, le P. de La Chaise et les médecins Fagon et Félix, elle avoit été informée de la résolution prise par le Roi. Pour les détails, nous renvoyons au Journal de Dangeau et aux ouvrages que citent en note les éditeurs (Année 1686, 18 novembre, t. 1, p. 417). Voyez notamment l’extrait d’un manuscrit intitulé : Remarques générales sur le tempérament et la santé du roi Louis XIV, par les médecins Fagon, etc., à la suite des Mémoires de Choisy, coll. Michaud et Poujoulat, édit. Didier, p. 675-677.