Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/21

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laissoit pas d’être sensible, et que, comme elle avoit toujours éperdument aimé le Roi, la jalousie avoit pu lui suggérer ce dessein ; d’autres, plus avisés, rejetoient toute l’intrigue sur une des dames de la Reine, qui, étant la confidente de sa maîtresse, avoit cru sans doute lui rendre un bon service que de procurer, par cet artifice, l’éloignement de sa rivale. Quoi qu’il en soit, le Roi, apparemment, en jugea mieux que tous les autres en disant que Lauzun avoit part dans cette affaire ; non pas qu’il crût qu’en effet ce fût lui, cela étoit moralement impossible, puisqu’il étoit déjà prisonnier, mais il donnoit à connoître qu’il croyoit que les personnes qui se sont toujours intéressées pour lui y avoient trempé. Tout le monde ne comprit pas la conséquence de ces paroles ; mais ceux qui savoient que la disgrâce du comte n’étoit venue que pour avoir mal parlé d’Astérie la conçurent aussitôt[1].

Il sembloit qu’après les protestations qui suivirent l’éclaircissement de nos amans, jamais on ne devoit plus parler de changement ; mais la suite des temps nous a bien fait connoître qu’il n’y a rien d’assuré dans ce monde, et qu’à la Cour les places les plus hautes y sont toujours les plus glissantes. L’indifférence a insensiblement succédé à l’amour, et cette passion, qui étoit si

    suis contente. » Quanto lui parla fort du frère de Monsieur, et si elle vouloit lui mander quelque chose, et ce qu’elle diroit pour elle. L’autre, d’un ton et d’un air tout aimables, et peut-être piquée de ce style : « Tout ce que vous voudrez, Madame, tout ce que vous voudrez. » Mettez dans tout cela toute la grâce, tout l’esprit et toute la modestie que vous pourrez imaginer. » (Lettre du 29 avril 1676.)

  1. Voyez t. II, p. 390 et suivantes.