Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/393

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aussitôt, et la maréchale de La Mothe la lui accorda volontiers, parce que la garde d’une telle marchandise est toujours dangereuse.

Ce ne fut pas pourtant par les avantages qu’elle y trouva, car, quoiqu’il eût toutes les charges dont nous avons parlé ci-dessus, elles ne regardoient que son fils aîné, et point du tout ceux qui pouvoient venir de sa fille. Mademoiselle de Toussi ne fit aucun effort pour s’opposer à ce mariage, quoiqu’elle aimât Caderousse et qu’elle se fût jusque-là flattée de l’épouser si sa femme venoit à mourir. Cependant, pour lui montrer que, toute prête à changer de condition, elle ne changeoit point de sentiment, elle lui écrivit de se hâter de venir s’il vouloit recueillir le fruit de ses promesses.

Caderousse, qui avoit fait son argent, prit la poste aussitôt avec ses lettres de change dans sa poche ; il trouva que le mariage n’étoit pas encore achevé, et la première chose qu’il fit fut de voir sa maîtresse, à qui il tâcha de persuader de lui donner la préférence par-dessus le duc d’Aumont, c’est-à-dire qu’il pût passer devant lui quand ce viendroit le moment de la posséder. Mais, soit qu’elle eût peur que, les vestiges étant encore si récents, le duc d’Aumont ne vînt à s’en apercevoir, ou qu’elle fît conscience de lui ôter en même temps et le cœur et ce que les maris sont bien aises de trouver, elle le blâma de sa délicatesse, et lui dit qu’il devoit être plus que content de ce qu’elle faisoit. Caderousse ne demeura pas sans réplique pour lui prouver que ces morceaux étoient des ragoûts d’un amant, et point du tout d’un époux ; mais