Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/40

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Et qu’il doit prendre un jour tous ceux qu’il n’a pas pris.
Rempli de ce désir, ce conquérant s’apprête
A cette importante conquête.
Il veut mettre en effet ses généreux projets,
Et pour montrer à tous qu’il peut ce qu’il désire,
Il commande à l’instant qu’on arme ses sujets,
Dans tous les lieux de son empire.
La Vertu, qui voyoit un effort si puissant,
Craignoit d’être contrainte à céder la victoire ;
Et pour mettre remède à ce danger pressant,
Elle fit avertir la Gloire.
La Gloire[1] a de l’honneur et de la probité ;
Jamais le malheur ne l’étonne ;
Elle songe toujours à l’immortalité,
Et ne fait que ce qui la donne.
Elle aime la Vertu, mais c’est du fond du cœur ;
La Vertu l’aime aussi comme sa propre sœur ;
Elles sont deux et ne sont qu’une.
Souvent l’une pour l’autre elles ont combattu,
Et l’on a vu souvent la Gloire et la Vertu
Faire tête à la Fortune.
Si la Gloire aimoit les appas,
La Vertu, cette guerrière aimable,
Quand l’Amour étoit raisonnable,
Ne le haïssoit pas.
Il est vrai qu’autrefois ils avoient eu querelle :
L’Amour l’ayant choquée en cent occasions,
La Gloire avoit aussi blâmé ses actions,
L’ayant même traité d’ingrat et d’infidèle ;
Mais dans leur amitié sincère et mutuelle
La Gloire avoit aussi servi l’Amour

  1. Mad. L. D. M. Sic dans le texte ; mais voyez à la p. 11 et à la p. 33.