Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/298

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

voluptueux disent ordinairement que le printemps d’une beauté passe comme une fleur qui ne revient jamais, et qu’il faut aimer dans un si bel âge. Ce sont des discours que l’amour-propre leur inspire, et non la raison et la vertu qui est quelquefois éloignée de leur cœur ; mais demeurons toujours dans les bornes de l’honnêteté, et ne nous laissons point emporter au penchant rapide de nos inclinations. C’est le moyen le plus sûr de ne se repentir jamais de rien, et de vivre à l’abri des inquiétudes et des chagrins.

Revenons à notre Monarque, qui étoit dans une douleur extrême, et qui, ne pouvant oublier mademoiselle de Fontanges, fut pour passer ses ennuis deux ou trois jours de suite chez M. le duc d’Orléans où il trouva un grand nombre de dames de qualité et presque toute la Cour, qui étoit venue visiter Madame, qui avoit eu une légère indisposition.

Le Roi qui vit entrer le prince de Turenne[1] lui demanda, en souriant, s’il n’aimeroit jamais, et si sa malice seroit toujours égale pour les femmes, en se faisant aimer et puis se rire d’elles. — « Cette manière ne me charmeroit point du tout, continua le Roi. Il faut de la bonne foi avec les dames. — Ah ! répartit la duchesse de Gersay[2] qui étoit la plus belle personne

  1. Voy. t. III, pp. 194 et 489. Ce n’est certainement pas avec lui que le Roi peut avoir eu la conversation rappelée ici ; et s’il s’agit du vicomte de Turenne, il étoit mort depuis le 27 juillet 1675.
  2. Il n’y avoit pas de duchesse de Gerzay, mais une marquise de Jarzé, de la famille de celui dont il a été