Page:Byron - Œuvres complètes, trad Paris, 1830.djvu/201

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trop vif ne pénétrât pas ses veines. Alors elle se tint suspendue au-dessus de ses lèvres, recueillant avec délices sa respiration insensible.

144. On l’eût prise pour un ange incliné sur un mourant qui vient de remplir ses derniers devoirs : le jeune naufragé, environné d’un air calme et paisible, demeurait toujours assoupi. Zoé cependant faisait frire quelques œufs, jugeant bien après tout que le jeune couple finirait par songer à déjeuner, et pour prévenir leurs désirs, elle sortit les provisions de la corbeille qui les contenait.

145. Elle savait que les sentimens les plus purs ne peuvent suppléer à la nourriture, et qu’un jeune homme naufragé devait avoir besoin de manger. D’ailleurs, moins passionnée, elle bâillait un peu et se sentait déjà refroidie par le voisinage de la mer. Elle fit donc cuire aussitôt le déjeuner. Je ne dirai pas qu’elle disposa du thé, mais du moins il s’y trouva des œufs, des fruits, du café, du poisson, du miel et du pain, ajoutez-y le vin de Scio, — et le tout par amour, sans aucune rétribution.

146. Une fois les œufs cuits et le café préparé, Zoé eût bien voulu réveiller Juan ; mais Haidée la retint de sa petite main empressée, et, sans dire une parole, lui mit un doigt sur les lèvres, ce que sans doute entendit fort bien Zoé. Le premier déjeuner étant perdu, il fallut en préparer un nouveau, puisque sa maîtresse ne lui permettait pas de secouer celui qui semblait ne jamais vouloir se réveiller.