Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 2.pdf/233

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Ce que je dirais pour te plaire
Ferait rire ailleurs de pitié :
L’amour est notre moindre affaire ;
Les grands ont banni l’amitié.
On siffle le patriotisme ;
Ce qu’on sait le mieux, c’est compter :
J’adresse une ode à l’égoïsme.
Pour toi je ne puis plus chanter.

                    On achète
                Lyre et musette ;
Comme tant d’autres, à mon tour,
Je me fais poëte de cour.

Je crains que ta voix ne m’inspire
L’éloge des Grecs valeureux,
Contre qui l’Europe conspire
Pour ne plus rougir devant eux.
En vain ton âme généreuse
De leurs maux se laisse attrister ;
Moi je chante l’Espagne heureuse.
Pour toi je ne puis plus chanter.

                    On achète
                Lyre et musette ;
Comme tant d’autres, à mon tour,
Je me fais poëte de cour.

Dans mes calculs, Dieu ! quel déboire
Si de ton héros je parlais !
Il nous a légué tant de gloire
Qu’on est embarrassé du legs.