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Page:César - Au moulin de la mort, 1892.djvu/15

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profonde ; d’étranges frissons, comme secoués par des êtres invisibles, passaient dans l’air et, flottante, la petite lumière de l’auberge révélait la présence de l’homme dans ces parages que l’on aurait plutôt crus voués à un isolement éternel.

Et ils étaient bien seuls, les pauvres fugitifs, au milieu d’une vallée jadis très peu connue, qui séparait alors, comme aujourd’hui, deux pays, la France et le territoire de l’ancien Evêché de Bâle. Aucune âme ne les épiait ; leur fuite — car c’en était une, on l’a deviné — pouvait s’accomplir en toute sécurité. À présent, ils sont déjà beaucoup plus tranquilles. Le Doubs les protège. Après s’être reposés, ils vont remonter enfin la côte, au sommet de laquelle s’étend le plateau des Franches-Montagnes et où est situé le village des Bois, but de leur voyage.


— Bonsoir ! dit Pierre, en pénétrant le premier dans la salle enfumée et mal éclairée de l’habitation qui, en ce temps-là, servait d’auberge. Nous voilà, mes braves gens.

Puis, se tournant vers les deux femmes qui l’accompagnaient, il ajouta, avec un accent de joie :