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Page:César - Au moulin de la mort, 1892.djvu/232

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que la stupeur m’ôta d’abord toute réflexion. J’étais là, à peu près inconscient de ma situation, ne pensant à rien ; en un mot, abasourdi. À la fin, et lorsque je sentis mes poignets enserrés par une chaîne, je compris ce qui se passait. À la guerre comme à la guerre ! En devenant contrebandier, on s’expose à subir un jour ou l’autre une pareille mésaventure.

Néanmoins, j’étais encore assez content. La barque s’éloignait, et j’étais seul au pouvoir des gabelous. Bien que je ne me fisse aucune illusion sur le sort qui m’était réservé, je n’avais, en somme, de compte à rendre à personne.

L’embarcation partie, les douaniers me placèrent au milieu d’eux et nous remontâmes le Doubs. La nuit était fort sombre, vous vous en souvenez, du reste. Ils avaient une lanterne, dont la faible lumière leur servait à reconnaître le chemin.

Nous passons successivement la ferme des Châtelain, le Refrain, puis les Gaillots. De là, nous quittons le fond de la vallée et gravissons la côte française.

Vous affirmer que j’étais pleinement tranquille serait le contraire de la vérité. Cependant, je n’avais pas une folle peur. Outre que