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LE FORGERON DE THALHEIM

ou mieux de volonté pour arrêter son imagination dès que cette folle du logis s’aventurait au loin.

Son éducation s’était naturellement ressentie de ses goûts. Elle eût pu, comme bien d’autres, passer deux ou trois années au couvent. Mais cela n’était pas son fait. Il lui fallait l’air pur des champs, le clapotis de l’eau sur la grosse roue de la tuilerie, la brise embaumée des âcres parfums des bois, les fleurs du printemps et les chaudes soleillées de l’été. Aussi lorsqu’on lui avait parlé d’aller vivre derrière les murs d’un pensionnat à la mode, elle avait nettement déclaré à ses parents qu’elle en savait assez pour sa position, qu’elle n’ambitionnait qu’une existence calme, sous l’aile maternelle, à l’abri des passions du monde. Et là-dessus la mère l’avait embrassée follement sur les deux joues, et chacun s’en était bien trouvé, sauf le père, qui aurait voulu, pour sa Suzanne, un avenir plus brillant. Mais, où prendre le courage d’attrister des yeux couleur de ciel quand ils ne demandent qu’à sourire ?

Néanmoins, Joseph Teppen s’était bel et bien promis de veiller sur les premiers pas