Page:César - Le forgeron de Thalheim, 1885.djvu/21

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

21
LE FORGERON DE THALHEIM

comme lui (en apparence, du moins). Sa femme Marguerite n’avait, à vrai dire, aucune opinion. Les ouvriers suivaient le patron. Quant à Suzanne, elle n’allait pas si loin. Elle manifestait franchement sa manière de voir. Son bon sens se révoltait à l’idée qu’elle aussi avait servi de rançon de guerre. Et, intérieurement, elle détestait de la belle façon tous ces fringants gendarmes qu’elle voyait brûler la route, au galop de leurs chevaux.

Nous ferions preuve d’inexactitude si nous négligions de dire que souventes fois déjà Suzanne avait remarqué Robert Feller dans les alentours de la tuilerie. La mine sérieuse du forgeron, un brin attristée, lui plaisait. Et, quand, longeant la haie du jardin pour se rendre chez son vieil ami Jean Schweizerl, Robert saluait la jeune fille, celle-ci avait pour lui un de ses plus séduisants sourires. D’ailleurs, au village, on parlait très avantageusement du fils de la veuve. On le savait brave. L’audace chez l’homme éveille la sympathie chez la femme. À Reichshofen, il avait été décoré ; le général avait même cité son nom à l’ordre du jour. De plus, on le connaissait comme nourrissant toujours, au