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Caughnawaga est bâti sur une pointe rocheuse s’avançant dans le Saint-Laurent, où l’église, une modeste chapelle en pierre brute, mire sa toiture argentée et la flèche de son unique clocher. Voici ce qu’en dit le P. Charlevoix dans une lettre adressée à Mme la duchesse de Les Diguières, en 1721, après une récente visite faite au Sault Saint-Louis : « La situation est charmante, l’église et la maison des missionnaires sont les plus beaux édifices du pays. »

La cloche qui, trois fois par jour, module sa prière aérienne, est le sujet d’une jolie légende. Il advint que le navire porteur du précieux airain, tomba aux mains des Anglais. Les Iroquois, qui attendaient toujours leur cloche, désespérés comme sœur Anne de ne rien voir venir s’enquirent des causes du retard. Apprenant que les fils de John Bull détenaient leur propriété, ils s’indignèrent et protestèrent contre cette violation des droits de la justice. Trois des plus influents de la tribu allèrent porter leurs revendications jusqu’aux pieds du roi d’Angleterre. Ils obtinrent justice et revinrent triomphants à la bourgade avec leur conquête, qui depuis n’a cessé de chanter sa délivrance.

L’ancienne demeure des gouverneurs français est devenue le séjour ombreux et fleuri des prêtres qui desservent la paroisse, composée de 2059 âmes, dont trente seulement sont protestantes. Le presbytère est une antiquité lui-même, par l’étrangeté de sa construction et la lourdeur de sa maçonnerie qui peut défier bien des siècles. Il reste aussi le dépositaire de plusieurs souvenirs archéologiques de grande valeur : la table sur laquelle le P. Charlevoix écrivit une histoire du Canada, sa bibliothèque, le portrait à l’huile du naïf historien, de vieux manuscrits, un dictionnaire et une grammaire autographes de la langue iroquoise, etc. L’église et l’école sont