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bleu — blanc — rouge

Prudence égoïste, que répudieraient les Sainte Catherine, les Sainte Cécile, les Thomas Morus et tous les martyrs d’une cause, qu’ils croyaient sainte. Donc Victoria I, tu as été lâche, tu n’as pas eu le courage de tes convictions, tu n’as pas droit à ce titre de catholique !…

Si la Reine est protestante, on ne peut invoquer en sa faveur la bonne foi ou l’inconscience morale de ses actes, car la défunte Majesté était une femme savante, un tantinet bas-bleu.

On a rendu hommage à ses talents d’écrivain, de moraliste, voire même de philosophe ; et ses écrits révèlent une âme éprise du spiritualisme le plus pur. Donc, Victoria, protestante convaincue, répudiant nos croyances, nos prêtres, notre culte, expirant entre les bras d’un ministre protestant, moi canadienne catholique, j’ai le courage de ne pas courber mon front devant l’idole aux pieds d’argile !

Ah ! bénis, ton étoile, Reine, qui te fit naître au siècle des lumières ! Si tes lèvres d’adolescente avaient prononcé cette apostasie aux sombres époques du moyen âge, c’en était fait de toi ! C’est les pieds nus, la corde au cou, revêtue d’une longue tunique blanche, Victoria, qu’il t’eut fallu abjurer tes fatales erreurs ou mourir sur le bûcher. La vierge d’Orléans n’en a pas tant dit et sa jeunesse et sa gloire n’ont pu vaincre ses infâmes bourreaux. Horreur ! la question, avec ses instruments de torture auraient déchiré cette chair royale dont tu étais si impudemment fière, que pas un seul jour de ta vie, même à son déclin, tu n’as cessé de la jeter en pâture à l’univers écœuré…

Et, des bonnes âmes qui frémiraient d’indignation, en voyant une fillette montrer la naissance d’un cou blanc,