Page:Côté - Bleu, blanc, rouge, 1903.djvu/72

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

la baguette du chef d’orchestre emplumé a ralenti son moulinet…

C’est un plaisir contestable que de caracoler en culotte de velours, cramponné à la crinière d’un vieux cheval, de se forcer pour rire des grosses facéties de farceurs endurcis, de faire écraser ses cors, de déchirer ses belles robes, d’attraper des coups de soleil sur son joli nez, de se faire embrocher un œil par quelque parapluie. Beaucoup trouvent ça délicieux !

Une Saint-Jean-Baptiste pas de feu d’artifice, mais c’est un ciel sans soleil ! Quelle belle occasion perdue de se réjouir le cœur et d’ébaubir les habitants de Jupiter, de Mars et de Vénus, de leur montrer comme on s’amuse chez nous !

Parlons sérieusement, n’avez-vous souci de voir s’en aller en étincelles, en fumée, en vaine gloriole, l’argent de notre trésor, quand il est des petits à nous qui se couchent sans souper ? Et, me permettriez-vous une suggestion ? Invitez donc tous les bébés des pauvres à une dînette sur la montagne. Les oiseaux prêteront bien leur salle à manger et se chargeront en plus de la musique. Au lieu d’un Saint-Jean-Baptiste, nous en aurons des milles. Tenue de rigueur : petite robe de coton blanc, cou, bras et jambes nus, un grand chapeau, parce que le soleil serait tenté de les baiser trop fort, ces chers amours. Menu : des gâteaux, des bonbons et des fruits.

Voyez le tableau : un ciel tout bleu, une nappe de gazon, des serviettes de feuilles d’artichauts, des fleurs, des enfants heureux et gazouillants comme des oiselets, et dans l’âme de chacun, du bonheur qui passera par tous les pores, enveloppant d’effluves attendries ce beau jour de fête !