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la terre ancestrale

a ajouté qu’il fallait suivre le chemin tracé par Dieu, ne pas manquer sa vie à cause des vieillards qui, eux, n’en ont que pour quelques années à vivre. Après un instant de silence, elle a continué : « Tu sais, ma petite fille, ton père serait bien affligé à ton départ, mais encore plus de te savoir melheureuse ». Elle parlait sans me regarder, mais je voyais qu’elle était toute rouge. Je pense qu’elle regrettait ses premières paroles et ne savait plus comment s’en tirer.

Après cela, j’ai réfléchi pendant toute une semaine et j’ai bien prié. Enfin, l’autre jour, j’ai pris une décision, j’ai fait une chose qui m’a bien gonflé le cœur. Tu sais que je devais me marier après les foins. Eh bien, j’ai rencontré Paul ; il m’a parlé du mariage. Alors je lui ai dit que je ne pouvais pas laisser mes parents, que je devais lui rendre sa parole. Il est devenu comme pétrifié. Je me sentais les yeux tout pleins, et j’allais me sauver. Il m’a demandé : « C’est vrai cela, Adèle, C’est pour les vieux seulement, vous avez toujours de l’estime pour moi ? » J’ai répondu : « Oui ». Je n’étais plus capable de parler et je m’éloignais vite, lorsqu’il m’a crié : « Adèle ! je vous attendrai tant qu’il faudra ». Il m’en a fallu du courage pour lui parler ainsi. Je ne craignais pas pour moi, car je puis supporter bien des petites douleurs ; mais ce pauvre Paul ! j’ai bien peur qu’il ne souffre beaucoup. Tu dois trouver