Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/148

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des fruits d’automne, du soleil levant, de tout ce qui a force dans la nature.

Vierges républicaines, filles et sœurs de proscrits, sortez des murs de Rome, à l’heure où la nuit monte au ciel, où les soldats de la France roulent sous les tables des cafés, témoins de leurs exploits.

Courez aux rives du Tibre, le fleuve où se plongeaient vos héroïques aïeux ; remplissez vos amphores de son onde lustrale ; recueillez les blanches fleurs du jonc, les couronnes du nénuphar flottant, et les perles bleues du myosotis.

Et puis, vous remonterez. La lune, amie de ceux qui pleurent, vous prêtera le secours de sa mystérieuse lumière pour découvrir l’endroit des remparts où repose celui qui fut notre frère.

Là croissent, pleines de vigueur, les plantes qui prennent racine dans les ossements des guerriers : la mauve salutaire, le réséda parfumé et la violette qui sourit aux étoiles. Les plantes sont les âmes bienheureuses des corps privés de vie ; elles planent sur leurs tombeaux afin de s’entretenir avec les mortels.

66 Là, vous tresserez des guirlandes et des couronnes fraîches, entrelaçant les fleurs du fleuve avec les fleurs du sépulcre. Là, vous confondrez dans vos prières le nom de Laviron et les noms de vos pères, et ceux de vos amants absents. Là, vous mêlerez vos chants aux serments de liberté que les véritables descendants de Rome confient aux discrètes solitudes de l’Aventin. Là, vous verse-