Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/255

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si c’est la faim qui te met aux prises avec la justice des hommes.

— Je ne suis pas voleur, et je gagne ma vie avec la vie de mes semblables.

— Duelliste alors ? Un homme qui passe sa vie à faire des morts, une de ces bêtes féroces sur le passage desquelles on devrait tendre des pièges à loup, un mercenaire qu’on paie pour détruire, au nom de l’honneur, et dont tout l’honneur consiste à faire étinceler la pointe d’une épée. == Spadassin ! tu es trop vil pour que jamais je mette ma vie à la discrétion de ton adresse.

— Je ne suis pas duelliste, et je gagne ma vie avec la vie de mes semblables.

— Bourreau donc ? Crâne rempli de sang et de bestialité, instrument qui efface l’œuvre du temps et des mondes, l’homme, fleur à peine éclose de l’éternelle création. T’es-tu jamais demandé qui l’avait fait, qui pourrait le refaire, qui a le droit de le supprimer ? Non tu es payé par les sociétés lâches pour tirer le fil qu’ont tissé leurs colères. == Oh ! la plus épouvantable des machines ! Le père qui t’engendra sema du sang dans le ventre de ta mère, car tu fais tomber des têtes sans jamais exposer la tienne, et tu t’engraisses de la maigreur des condamnés !

— Je ne suis pas bourreau, et je gagne ma vie avec la vie de mes semblables.

— Qu’es-tu donc enfin ?

— Je suis agent de la police secrète.

— Loin de moi, loin de moi ! C’est toi qui ravis