Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/372

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aux âmes indépendantes, et que ceux qui la suivent avec le plus d’ardeur ne se bouchaient pas les oreilles quand la fusillade grondait à Paris. C’est bien dommage, en vérité, que des passions si nobles soient tombées aussi bas, et la vile mob n’aurait jamais dû oublier qu’il y a des existences d’animaux plus précieuses pour vous que des existences d’hommes ! Mais dites-moi, nobles de par le roi, croyez-vous que bonne race de loups ne vaille pas bonne race de chiens, et vous imaginez-vous, d’aventure, que vous ferez toujours sauter nos têtes ainsi que des bouchons de Champagne ? Nous sommes des chasseurs, des Jacques, des loups, entendez-le bien, et nous prétendons chasser ce que bon nous semble, même l’homme, surtout l’homme, quand bon nous semble, où bon nous semble, absolument comme vous. Au plus habile le butin. Nous sommes de ces hommes dont Schiller dit : « Leur mission c’est la loi du talion ; leur vocation, c’est la vengeance. » Nous sommes autant de brigands.

Je n’ai pas besoin de vous dire pourquoi le droit de chasse m’offre plus d’attrait qu’un autre ; il suffit qu’il découle de ma nature d’homme et de mes propensions actives pour que vous n’ayiez rien à dire quand il me convient de le faire valoir. Gardez-vous bien, voyez-vous, de supprimer les permis de chasse. S’il y avait encore un levain de révolte dans le sol de France, c’est ainsi que vous le feriez éclater. Ne savez-vous pas que rien n’est plus outrageant 214 pour notre dignité qu’une