Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/153

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vail. Elle meurt de dégoût dans les foules 81 pressées où des hommes sans délicatesse, sans courage et sans cœur l’obsèdent, par milliers, de leurs convoitises brutales. »

— Donc j’ai suivi l’appel de ma fierté. Et je publie ce livre pour faire honte de leur laideur aux mendiants, aux parasites et aux valets de ce demi-monde :

Et je sème, et je chante, et je crie : Liberté.


J’ai dit en mon étonnement :

Comment se fait-il que les civilisés taxent de folie toute œuvre originale ? Comment se fait-il que toute autre ambition que celle de la fortune leur paraisse inutile, condamnable ? Comment se fait-il que l’ouvrier, l’artiste, le penseur succombent, privés de tout, abreuvés de dédains, s’ils ne se vendent pas ?

Misère des misères : ah ! tout n’est que misère !

Et la Raison m’a répondu :

« Ton désintéressement t’appelle : suis-le ! — De nos jours, l’habitude est une seconde nature, et l’intérêt un besoin vital. L’Épargne, la Gêne, la Médiocrité s’effraient de tout ce qu’elles n’ont pas coutume de voir. Le siècle est si bien habité, la confiance est si grande que le premier soin de deux bourgeois qui se rencontrent, est de veiller sur leurs mains et leurs poches. Amitié, haine, considération, protection, négoce, tous rapports commencent, finissent et se résument par une question d’argent. Malheureux les désintéressés