Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/160

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sente, il n’aura pour lui que de rares proscrits et de timides sympathies personnelles. — Cependant on le trouvera dans les contrées lointaines. Il passera mers et frontières en contrebande, page par page, morceau par morceau, comme les feuilles d’automne par les vents emportées, les feuilles qui fertilisent le sol sans que l’agriculteur prenne soin de les répandre.


Qu’il aille, ce livre !

Ce n’est pas un écrit ; c’est une volonté, c’est un acte, c’est toute une conduite qui se déroule devant le public. À toutes les questions insidieuses il répondra franchement, clairement, par oui ou par non, comme un enfant gâté. Au mensonge il opposera la vérité, la lumière aux ténèbres, l’intérêt de tous à l’intrigue des partis. Il chantera le travail et la joie comme un nombreux 86 orchestre ; il tonnera la guerre, hurlera le tocsin comme cent canons, comme toutes les cloches d’un empire ; il battra, rompra les vieilles digues du Monopole, avec fracas, avec furie, comme les vagues triomphantes de l’Océan !


Qu’il aille, ce livre !

Depuis qu’il est écrit, je sens ma conscience allégée d’un grand poids. Dans le flot de paroles qui roule sur le monde, du moins j’aurai jeté de nouvelles pensées ; au milieu de la torpeur de tous, du moins j’aurai fait preuve de haine, d’amour et de conviction ; j’aurai fait feu du moins sur tous les grands voleurs !