Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/222

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facile, Cholat le seul militaire libre que j’aie connu jamais. Je ne pourrais les nommer tous : il en est tant d’inscrits sur l’infernal martyrologe ! !


Hélas ! les hommes sédentaires repoussent les déclassés, ils ne les emploient que par grâce. Nous n’avons de foyer que l’auberge, l’hôpital, la caserne et la prison ; là les vents se réjouissent et la douleur est reine. Sur toutes les routes où nous errons, les étoiles des nuits, la lune mélancolique et le joyeux soleil éclairent des poteaux où les gouvernements font inscrire ces cruelles paroles : « Ne pourront s’arrêter ici plus d’un quart d’heure les mendiants et les proscrits. »

Roule, roule autour du monde et n’y rentre jamais, voyageur exilé !


Avez-vous vu partir les grands vols d’hirondelles ? Chacune rappelle les autres aux accords de son chant. Puis elles se dispersent ; le vent tord leurs ailes et les roule, légères, dans ses tourbillons. Égarées, lasses, au désespoir, haletantes, râlantes, elles tombent par milliers dans les vastes mers ou sur les rivages des continents.

Ainsi de nous. Ainsi des beaux Girondins qui se couchaient dans les blés, derrière les haies, au pied des ruines, pour y dormir leur dernier sommeil, l’affreux sommeil de la faim !

Roule, roule par le monde, voyageur exilé !