Le matin, quand la libre alouette envoie ses vœux au rouge soleil, quand la terre est facile aux charrues, quand le vent n’emporte pas les graines trop loin du frais sillon, quand je me sens gros de pensées, reposé d’esprit et de corps, je transcris avec bonheur mes rêves de la nuit et me mire sur mon papier qui brille aux premiers rayons de la lumière. Et que m’importe l’opinion des hommes, et quand viendra le temps de la moisson !
39 Le soir, quand la chaste Diane rejette de ses épaules son manteau gris, quand l’air devient transparent aux douces étoiles, quand les vers-luisants font des songes de grandeur dans les gazons, je m’endors, le cœur content, n’ambitionnant des biens de ce monde que la paix et la liberté.
Je ne veux rien de ce que les civilisés pourraient m’offrir. Si j’ai désiré le pouvoir, qu’on me nomme garde-champêtre à perpétuité. — Si j’ai convoité la fortune, que mes pensées les plus chères se changent en poussière d’or sous le bec de ma plume. — Si j’ai rêvé de vains honneurs, que je sois poursuivi, comme un roi constitutionnel, par les lourdes salutations des bourgeois d’Occident. — Si j’ai l’ambition des titres, que je sois rapetissé jusqu’au plus grand de tous. — Si j’ai recherché les faveurs d’un parti, que je sois contraint de boire toutes les nuits du petit vin et de la grosse bière, aux mâles accents de la Marseillaise entonnée par un chœur de rrrévolutionnaires vigoureux. — Si j’ai soupiré pour la réputation du jour, que je m’entende lire, nommer, admi-