Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/373

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

beaux ils détachent de leurs corps pantelants ! Et cependant une vengeance toujours nouvelle crispe leur foie ; toujours leurs yeux pleurent une nouvelle pluie sanglante, toujours repoussent sur leurs os de nouveaux muscles, une peau nouvelle.

— Si nous nous arrêtions, dit le fossoyeur, je suis las de fouiller ma vie dans tes entrailles. — Je le veux, répond le bourreau, je suis fatigué de trancher tes os avec mes dents.

L’Enfer est sur la Terre !

Mais à peine l’armistice est-il conclu que la fosse s’ébranle au roulement de mille tambours voilés. En même temps elle se remplit de clartés sépulcrales, du sifflement des fouets cruels et des tristes refrains du cantique pour les morts. Et voici qu’une voix nasillarde, voix de juge et de prêtre, s’écrie : « Travaillez, travaillez plus fort, maudits ! Versez le sang, tourmentez la fibre pour notre compte ; nous vous donnons votre part de curée, nous vous défendons de vous arrêter dans les siècles des siècles ! »

Et l’implacable combat recommence, et de nouveau jaillit le sang, et de nouveau crient les chairs sous les crocs anguleux !

L’Enfer est sur la Terre !

504 Si le fossoyeur et le bourreau ne craignaient pas de raconter leurs rêves, les hommes verraient que je n’exagère pas les peines qui les obsèdent ; ils se convaincraient que l’Opprobre et la Malédiction pèsent d’un poids énorme sur l’âme