jeune fiancée de la Mort, appelle-moi de ta voix la plus douce !
Ici je veux rester jusqu’après le déclin du jour, attendant l’heure du rossignol et du ver-luisant. Je veux suivre dans les buissons le vol des phalènes et les danses des feux follets. Esprits des morts, âmes heureuses, consolez-moi ! Consolez-moi, les cieux ! Clair de lune, bruits de la terre, chants du fleuve, frémissements de l’herbe, consolez-moi ! Les vivants font tant de mal…
Je veux penser à la pauvre femme suicidée, morte sans qu’une larme vint rafraîchir ses lèvres ; morte sans exciter un regret ; morte, n’emportant de cette terre que la blanche robe qu’elle destinait aux joies des fiançailles. — L’amour tue !
Le prêtre et le philosophe ont touché du bout de leurs manteaux l’humble pierre de sa tombe, et ils ont dit : Réprouvée, maudite la misérable qui succombe aux tentations de l’amour, au 307 délire du suicide ! Et depuis, les souris chauves ont répété tous les soirs : Crime ! Malédiction ![1]
- ↑ Moi-même, oui moi, dans un temps où je me croyais sage, j’écrivais, pauvre fou : « Le suicide est un acte lâche que réprouvent également l’opinion et la loi. » (De la Révolution dans l’Homme et dans la Société.) — L’opinion ! la loi ! mensonges, tyrannies, camisoles de force, furies qui déchirent ton âme toujours jeune, Éternité, ma mère !