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BALZAC IGNORÉ

sans fortune, seul avec ses pensées, derrière le corbillard qui conduit son père au cimetière. Dévoré d’une ambition excessive, il se croit destiné à de grandes choses, mais il doute de lui-même.

Désireux de faire rapidement fortune, il se livre à la passion du jeu ; mais la déveine le poursuit obstinément. Le jour où, selon la triste pensée de J.-J. Rousseau, il ne voit plus entre lui et la mort que son dernier écu, il retourne au jeu. Après avoir perdu tout ce qui lui restait, il prend la résolution extrême de se noyer ; mais le hasard le conduit devant l’étalage d’un marchand d’antiquités. Il y pénètre. Le marchand, un vieillard au masque ricanant, devine les sinistres pensées du joueur : « Auriez-vous la maladie d’or, lui dit-il, ou voudriez-vous détrôner l’ennui ? Enfin, quelle erreur vous engage à mourir ? » Le vieillard offre à Raphaël de le faire plus riche, plus puissant et plus considéré que ne peut l’être un roi, et pour cela il lui fait cadeau d’une peau de chagrin. Cette peau, lui assure-t-il, est un talisman. L’homme qui la possède possède tout ; il n’a qu’à vouloir une chose et son désir se trouve aussitôt accompli. Mais l’existence de cet homme dépend irrévocablement de celle du talisman. A chaque souhait, la peau de chagrin diminue ; à cette diminution, proportionnée à l’intensité du désir, correspond une décroissance des jours de