Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/124

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mode intermittent de l’intoxication à son début, et du terrain particulier sur lequel celle-ci s’est développée.

Si l’on se rappelle certains détails de son observation, les cauchemars terrifiants, les fantômes grimaçants, les sensations de chute au fond des gouffres, les bêtes apocalyptiques qui le poursuivaient, toute cette fantasmagorie mobile, changeante, cinématographique, cette insomnie épouvantée, ces réveils en sursaut avec persistance de l’image angoissante, ne pensera-t-on pas plutôt à des stigmates d’alcoolisme qu’à des symptômes de thébaïsme ?

Que l’alcool ait contrebalancé l’effet déprimant, hyposthénisant de l’opium, qu’il ait combattu, par son action stimulante, l’influence torpide de son associé, il n’y a rien là que de vraisemblable. Cela expliquerait peut-être et la tolérance de Quincey à l’égard d’un poison qui ne pardonne guère, et sa longévité, véritablement exceptionnelle chez un opiophage.

Maintenant est-ce à l’opium, est-ce à l’alcool qu’il fut redevable de sa névrose ? Celle-ci n’entre-t-elle pas, pour une bonne part, dans l’héritage morbide qu’il avait reçu et qui devait trop bien préparer le terrain à toutes les passions maladives ? Là croyons-nous, est le mot de l’énigme.