Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/221

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maison infectée par la contagion » ; et, conclut George Sand en se remémorant l’aventure, « la jurisprudence indigène nous eût plumés comme des poulets ». On n’avait plus qu’à plier bagages et à reprendre le chemin de France.



GEORGE SAND
d’après son portrait par Delacroix

Dans une atmosphère dont le souffle est comme une caresse, au sein d’une nature luxuriante, Chopin, malgré l’évolution continue de son mal, avait pu tout d’abord accorder une trêve à sa mélancolie ; les sombres pensées ne trouvaient pas d’asile durable dans cette île fortunée, où la vie avait les apparences d’un rêve. Sa compagne signale ce bien-être moral passager, sous l’heureuse influence du climat bienfaisant : « Il n’était plus sur terre, il était dans un empyrée de nuages d’or et de parfums ; il semblait noyer son imagination, si exquise et si belle, dans un monologue avec Dieu même ; et si parfois, sur le prisme radieux où il s’oubliait, quelque incident faisait passer la petite lanterne magique du monde, il sentait un affreux malaise, comme si, au milieu d’un concert sublime, une vielle criarde venait mêler ses sons aigus et un motif musical vulgaire aux pensées divines des grands maîtres. »

L’harmonie régnait encore entre les deux êtres, si peu faits pour vivre ensemble ; elle n’allait pas tarder à être troublée, puis à être rompue sans retour.