Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/34

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Ce qu’il y a de particulièrement intéressant à relever chez Hoffmann, c’est que ses troubles organiques même ont servi son génie, et qu’il a puisé peut-être le meilleur de son inspiration dans son déséquilibre fonctionnel.

Il appartient à cette catégorie de grands hommes « dont la route a été tracée à travers toutes les afflictions humaines et dont un fatal destin a nourri l’imagination par des maux inouïs et par une éternelle misère[1] ». Combien d’amertumes secrètes, de fronts plissés, de bouches aux plis désabusés, sur les portraits des grands railleurs de l’humanité ! Que de souffrances se dissimulent sous un masque moqueur ! Et comment ne pas être saisi d’admiration devant des hommes comme Scarron, riant des torsions de son corps disloqué ; comme Molière, se mettant en scène dans le Malade, jusqu’à en mourir ; comme Hoffmann enfin, suivant sur lui-même les phases progressives d’un mal qui le conduisait à la tombe.

Quelle fut la nature de cette maladie qui lui fit souffrir « mort et passion », comme disent les bonnes gens, et à laquelle il ne succomba qu’après une agonie prolongée ? Longtemps on a cru, sur la

  1. Loève-Veimars, Œuvres complètes d’Hoffmann (préface).