Page:Cabanis - Rapports du physique et du moral de l’homme, 1805, tome 2.djvu/71

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leurs infortunés esclaves[1]. D’ailleurs, si les dispositions mélancoliques, le penchant à l’enthousiasme, les sentimens concentrés, les fureurs extatiques et amoureuses, étoient encore aggravés par la diète monastique ; d’un autre côté, les chaînes religieuses dont on vouloit charger ces imaginations affoiblies, en recevoient une nouvelle force. Il étoit plus facile de subjuguer des âmes avilies, de les environner de terreurs fantastiques, de sombres et décourageantes illusions. Ces tristes victimes devenoient sans doute plus malheureuses ; mais en même temps elles étoient plus soumises : et soit que le fondateur crût, ou ne crût point mieux assurer par-là, leur bonheur dans un autre monde, il avoit assuré la durée et

  1. Dans les coutumes d’un des généraux des Chartreux, appelé Guigues, on trouve à l’article de la saignée, on de minutione : Minuimur in anno quinquies. Sans cela, ces malheureux tomboient dans de violens délires, ou le couvent étoit en proie aux scandales et aux mêmes fureurs qui éclatent dans les bagnes et dans les prisons.

    Ce Guigues gouverna depuis 1109, jusqu’à 1136. Voyez les Annales de l’ordre des Chartreux, par dom Masson, qui dit que de son temps, c’est-à-dire dans le 17e siècle, on saignoit les moines avec plus de réserve.