Page:Cadiot - Minuit.pdf/286

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— Mais qui ? mais qui donc, encore une fois ? Tu nous tues avec tes terreurs… perds-tu la raison ?… Qui ?…

— Mais lui !… Mornaix ! répondit le malheureux avec un regard fou.

Madame Manoquet se jeta sur son mari pour étouffer ses paroles.

— Tais-toi, tais-toi, malheureux, s’écria-t-elle, pour ta fille, pour ta vie, pour nous tous.

— Quoi donc ? Qu’ai-je dit ? reprit tout à coup Manoquet, ramené par l’épouvante de sa femme au sentiment de la réalité.

— Bien, mon ami, répondit la pauvre créature.

Depuis ce jour, jusqu’à celui de la scène que nous avons décrite au Café de la Mairie, la vie de ces deux êtres fut infernale. Manoquet sentait la folie lui étreindre le crâne malgré ses combats, malgré l’énergie d une volonté devenue terrible. Sa femme attendait, le cœur tordu par l’angoisse, chaque péripétie de l’instruction criminelle en conjurant le scandale par des efforts suprêmes.

À tout prix, elle voulait détourner l’attention jusqu’à l’hiver, pour emmener Manoquet à Paris sans causer trop d’étonnement. Mais, chaque jour, de nouvelles scènes rendaient la feinte impossible ; chaque jour la catastrophe devenait plus imminente. L’épouse et lanière, la voyait inévitable, terrible, menaçante, et prête à faire crouler l’édifice de tant de comédies et de mensonges.

Il y a des dévouements inconnus et des expiations im-