Page:Cadiot - Nouvelles.pdf/195

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Mme de Braciennes, qui m’a vue hier sur la promenade… Refuser sa lettre sans l’ouvrir, ce serait bien dur…, bien hautain… Après tout, Amélie de Braciennes a été mon amie… »

L’allumette lui brûlait les doigts ; elle la jeta dans la cheminée et porta sa main droite au cachet de la lettre.

« Eh ! d’ailleurs, qui saura si… »

Elle lança autour d’elle un regard furtif.

« Tandis que je m’exposerais à faire une impertinence…, à blesser cruellement une femme que son cœur seul a entraînée… »

Oh ! comme elle devenait indulgente !…

Le cachet sauta.

« Ce sont des vers ! » dit-elle.

Elle replia précipitamment la lettre et la glissa dans sa poche. Quelqu’un venait.

C’était sa femme de chambre, qui lui apportait une robe fraîche. Soudain, par l’effet d’une décision rapide, elle déjeuna en dix minutes et hâta les préparatifs de sa toilette.

Une sorte de surexcitation nerveuse lui faisait mettre de l’empressement à toutes choses. Depuis qu’elle avait pris le parti de garder la lettre, elle semblait devenue presque joyeuse. Elle se laissa complaisamment coiffer et habiller ; et, tout en se prêtant aux soins de sa femme de chambre, elle se disait avec un secret sentiment d’orgueil et de plaisir :

« Il est poète ! »