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Page:Cahiers de la Quinzaine, 14e série, n°9-11, 1913.djvu/112

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cahiers de la quinzaine


mobilisation avait été portée à un point de précision inouï. En moins de quelques minutes, (mettons six ou sept en tout), nous pouvions, partant du 45 de la rue d’Ulm, porter nos effectifs sur les points menacés de la Sorbonne. Il faut dire que conscrits, carrés, cubes nous étions des soldats de trois ans. Il y avait même un certain nombre de rengagés, sous le nom de bicarrés, archicubes et préparateurs. Le plus justement célèbre de ces préparateurs était le préparateur de mathématiques.

§. — L’avouerai-je, dans ce temps-là j’étais une sorte de chef. Il faut tout pardonner à la jeunesse. On a le droit d’être un chef jusqu’à vingt-quatre vingt-cinq ans. Vingt ans d’une solitude croissante et qui ne fera que croître me donnent peut-être le droit de rappeler que dans ce temps-là j’étais pour ainsi dire le chef militaire de l’ancienne École Normale. Ou plutôt il y avait deux chefs. J’étais le chef militaire les jours qu’il y avait à se battre. Herr était le chef militaire les jours qu’il n’y avait pas à se battre. Et comme la capacité d’un même homme ne varie jamais beaucoup, j’avais en somme dans ce militaire civil sensiblement le même commandement que j’ai depuis dans le militaire militaire. C’est-à-dire que j’avais une bonne section.

C’était bien, à bien peu près, le même effectif.

§. — Mon Dieu je ne dirai pas que je sauvai la vie à

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