Page:Cahiers de la quinzaine, série 6, cahiers 1-3.djvu/754

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de trouver la porte sur l’eau et de voir son ombre monstrueusement courbée le long du toit qui surplombait les profondes ténèbres. Il ouvrit la porte avec précaution et goûta la douceur de la nuit printanière. Tout était silencieux. L’étroit canal reflétait le clair de lune ; le palais opposé était noir avec une tache de lumière à une fenêtre ; au dessus de sa tête, dans la petite échancrure de ciel bleu foncé, un groupe d’étoiles rayonnaient, comme de brillants oiseaux, dans les ténèbres veloutées. L’eau battait tristement les marches de marbre ; une gondole attachée aux poteaux semblait se balancer doucement vers son ombre noire dans le canal.

Il marcha vers l’endroit où l’avenue d’eau était plus profonde et se laissa glisser doucement. Il se retrouva luttant, mais vainquit l’instinctive volonté de vivre.

Comme il plongeait pour la dernière fois, le mystère de la nuit, des étoiles, de la mort se confondit avec un tourbillon étrange de souvenirs d’enfance, et les paroles immémoriales du Juif agoni-